[Taverne tenue par Week] L'épis doré.

Près de la porte de Wildheart le Haut, qui donnait sur le quartier de Wildheart le Bas, des gardes, bien armés, contrôlaient les papiers de Psycheï. Très vite, ils lui posèrent des questions sur le but de son voyage :

- Une affaire privée que je dois traiter avec le roi en personne m'amène dans cette charmante ville.
- Vraiment ? Et en quoi consiste elle ?
- Affaire privée, c'est tout. Je n'ai pas le droit d'en parler.
- Malheureusement, nous allons avoir besoin de quelques détails pour vous laisser voir le roi.
- Les rebelles sont donc si menaçants ?
- Pas vraiment, mais mieux vaut-il être prudent.
- Je vois. Je viens pour traiter un accord commercial avec un pays de l'Ouest.
- On nous avait annoncé votre venue, en effet. Le roi ne pourra malheureusement pas vous recevoir tout de suite, je vous conseille de descendre à la taverne de «l'épi doré». Vous la reconnaîtrez facilement.

Et voilà, maintenant, Psycheï se retrouvait au comptoir de cette fameuse taverne, dont la signification du nom lui était très clair. De dehors, elle ressemblait vraiment à un épi, et cela avait fait sourire l'émissaire. Dans son pays, les choses étaient beaucoup plus uniformes, beaucoup moins originales qu'ici. Mais au moins, il n'était pas torturer par une guerre interne, souterraine, et qui risquait de miner le pays si le roi ne maintenait pas une main de fer sur son peuple.

- Pourrais je avoir une bière, s'il vous plait ? demanda Psycheï au tavernier.

- Merci.

Psycheï prit entre ses mains la chope de bière et commença à en boire le contenu, par petites gorgées. Le liquide ambrée coulait dans sa gorge et atténuait la soif que la poussière des chemins avait crées. L'émissaire n'aimait pas ce genre de voyage, si loin de son pays, dans un royaume aussi étrange que celui-ci.

- Des affaires à traiter avec le roi.

Sa réponse était laconique, mais trop s'étendre sur le sujet risquait de lui causer des ennuis. Psycheï aurait dû peut-être même du ne pas parler de ça à Yzuriana, à Sirlir.

- Vous qui êtes tavernier ici, vous devez savoir pas mal de choses. Auriez vous des informations sur la politique étrangère du roi, ses déboires avec les rebelles ?

L'émissaire préférait ne pas paraître devant le roi sans avoir un minimum d'informations sur lui. Les négociations risquaient d'être ardues, et ce serait partir d'un mauvais pied que d'ignorer des choses que le plus insignifiant habitant de Maélor saurait.

Il ne savait rien des rebelles. Cela n'aurait pas du tant l'étonner en fin de compte. Des êtres aussi insaisissables n'allaient sûrement rien révéler d'eux à des gens susceptibles de trahir leur confiance. Cette atmosphère de complot, de machination n'avait jamais plus à Psycheï, même si sa fonction baignait en plein dedans.

- Je n'ai nullement envie de critiquer d'une quelconque manière ce roi. Je préfère me faire ma propre idée de lui. Ce qui ne devrait tarder.

Une nouvelle gorgée de bière coula dans sa gorge, laissant un silence paisible flotter dans l'air.

- Mais c'est étrange que vous preniez autant de risques à calomnier le roi dans la partie du royaume qui lui est la plus soumise.

L'une des principales qualités des personnes qui fréquentaient les hautes sphères de la société, c'était leur capacité à dissimuler leurs émotions. Ainsi Psycheï n'eut aucun mal à dissimuler les siennes, même si intérieurement, elles bouillonnaient allégrement, la surprise, le doute et la suspicion dominant le reste. Comment le tavernier pouvait-il savoir que sa mission consistait à traiter au nom de son roi avec celui de Maélor ? La seule personne qui le savait, par une malheureuse indiscrétion de sa part, était Yzuriana. Seule elle avait pu prévenir le tavernier de l'épi doré, car les autres au courant de sa venue étaient tous des proches d'Eric qui jamais ne songeraient à le trahir. Tout un réseau d'espion se dévoilait à l'esprit de l'émissaire, et seuls les rebelles pouvaient avoir besoin d'espion…

- Mais mon roi est le même que le vôtre, je suppose. Nous parlons bien d'Eric, qui règne depuis quelques années ?

Imperceptiblement, la main de Psycheï glissa sous sa cape. Savait-on jamais…

La main de Psycheï ressortit de sa cape, tenant une fiole en verre et qui renfermait un liquide ambré. Un léger sourire naquit sur le visage de l'émissaire tandis que le liquide coulait dans sa chope. Chope dont le contenu fut très vite bu.
Psycheï n'eut pas l'occasion de répondre au tavernier, car la porte de la taverne s'ouvrit, et un garde entra, se dirigeant derechef vers le comptoir.

- Psycheï d'Eltrin ?
- Oui ?
- Veuillez vous présentez au porte du palais dans dix minutes, le roi sera prêt à vous recevoir.
- Bien.

Et le garde repartit aussi rapidement qu'il était venu, sa mission accomplie. Psycheï soupira, puis, reprit sa conversation avec le tavernier comme si de rien n'était.

- Pourtant, il a réussi à garantir une paix relative avec ses voisins, et dans l'histoire de Maélor, c'est un fait assez rare, je crois. Alors à part le problème avec les magiciens, je ne vois pas ce qu'on peut lui reprocher. Et puis, tous les rois sont un peu arrogants.